mardi 13 décembre 2011

Roman marquant : le Feu de Henri Barbusse

         Le Feu est paru en 1916. Il remporte le prix Goncourt la même année. C’est le récit romancé, mais vécu par l’auteur et ses frères d’armes, de la vie quotidienne des Poilus de 14-18.

            Dans le domaine public, il est disponible gratuitement en ebook :




            La première force de ce roman « historique », c’est son réalisme. Avant de le lire, je voulais trouver un livre d’histoire sur la vie quotidienne dans les tranchées. Après l’avoir lu, je n’en avais plus besoin.

            La seconde force du roman, ce sont ses qualités littéraires, son style, son rythme, sa poésie, son « art ».

            La troisième et la plus grande force du roman, c’est, à mon sens, la lucidité du soldat-romancier et son courage à dénoncer les travers de ses compatriotes, la façon dont la société française gérait la guerre. Le livre est sorti en 1916, en pleine guerre ! Ses critiques firent scandale par leur justesse.

            Tout y passe. D’abord, bien sûr, l’atrocité de la vie, de la survie, et in fine de la mort du poilu en première ligne. Ce thème a été depuis traité abondamment. Il suffit de mentionner que les Poilus, aussi courageux et épris du mortel triptyque et cryptique « Travail-Famille-Patrie » fussent-ils, ils espéraient la « bonne blessure », celle qui les éloigneraient de la première ligne quelque temps sans les rendre invalides.

Mais d’autres thèmes, à cette époque étouffés par la propagande sont dévoilés : la lucidité des Poilus vis-à-vis de la propagande, justement, dont ils raillaient l’exagération grotesque destinée à ceux de l’arrière. Mais aussi, les embusqués, les profiteurs de guerre, les civils peu compatissants envers les combattants, les exécutions sommaires des malheureux qui n’avaient pas le courage de sortir de la tranchée pour se faire tuer, les frustrations sexuelles des soldats, l’insuffisance du ravitaillement, les fraternisations et tant d’autres souffrances, tant d’autres scandales : il a tout osé déballer ! Sans exagération et sans complaisance.

Le seul élément qui lui a échappé, c’est l’incompétence des généraux français et allemands qui faisaient attaquer leurs troupes au point le plus fort du dispositif de défense ennemi, sans aucune imagination. Mais comment aurait-il pu dénoncer cette aberration, en simple soldat auquel la stratégie de la guerre échappait forcément depuis sa tranchée ? Et d’ailleurs, après la guerre, et aujourd’hui encore, les Grands Bouchers Bornés ont leur nom de rue, les Joffre, Hoche et autres Foch… De Pétain seul, nous sommes épargnés à cause de ses frasques durant la revanche…

            Une œuvre époustouflante, un des plus grands roman en langue française jamais écrits.


 
Vous aimerez peut-être :




2 commentaires:

  1. Un des livres les marquants et des plus poignants que j'ai eu l'occasion de lire.

    RépondreSupprimer
  2. C'est vrai, une fois lu, il brûle en nous à la manière d'un feu funéraire.

    RépondreSupprimer